Franchement, vraiment, et sincérement ou la langue de bois entre ami
Le livre ‘les mots qui polluent les mots qui guérissent » de Joseph et Caroline Messinger regorge de perles de sémantique du langage dit « moderne » voir « branché » et de la façon dont il nous bouffe le cerveau, nous vampirise et finit par nous intoxiquer sans que nous le sachions puisque bien évidemment nous finissons par tous parler comme notre voisin et donc par nous auto-intoxiquer… En voici un exemple …
« Franchement, tu vois je ne regrette pas d’être venu…«
Le mensonge est la traduction simultanée de toutes les vérités qui ne sont pas toujours bonnes à dire. Il est plus confortable de rêver que d’agir, plus simple d’espérer que de vouloir, plus facile de promettre que de tenir parole, plus confortable de se mentir que d’affronter la vérité. La franchise qui s’expose ainsi sous le feu de la phrase est-elle aussi sincère qu’elle en a l’air ? L’abus de l’adverbe « franchement » et autres cousins apparentés est malodorant (voir « Vraiment, Sincèrement », « Véritablement », « Certainement », etc. »).
« Je crois vraiment qu’il faut réfléchir à la question avant de s’engager tête baissée dans un piège à con. »
La phrase est délicieuse et frauduleuse à souhait. L’adverbe « vraiment » est superflu car il décrédibilise le reste de la phrase. Tous les menteurs vous diront franchement, sincèrement ou vraiment la vérité. Tous les conseilleurs, les charlatans ou les imposteurs abuseront de cette vérité adverbiale pour avaliser leurs manipulations. Vraiment, sincèrement, franchement sont trois adverbes privilégiés dans le discours de tous les simulateurs. « II y croit vraiment » n’est pas une affirmation renforcée mais un doute annoncé, doublé d’un gros mensonge. « C’est vrai que… tralala ! » appartient à la même famille frauduleuse des adverbes et attributs inutiles, mais qui travestissent si bien une vérité que nul n’a envie d’entendre.
« Non ! Franchement, c’est un mec bien ! » dit le menteur de service. Cinquante-trois fois en l’espace d’une dizaine de minutes. Il a répété 53 fois cet adverbe au point que l’animateur de l’émission a fini par jouer à la tyrolienne. Il s’agissait d’un candidat nominé de la Star Academy. Un vrai-faux pote, quoi !
Les mots qui guérissent de la langue de bois :
Les adverbes qui sont supposés supporter la vérité sont infréquentables. « Je vais vraiment te dire… » « Je suis sincèrement désolé…» « Je voudrais franchement t’ai-der… » « II faut véritablement faire quelque chose pour lui… » Stop ! N’en jetez plus ! Tous ces adverbes appartiennent au discours de la langue de bois. C’est « vraiment vrai » qu’il faut éviter d’accoler cet adverbe aux gros mensonges que vous essayez de faire avaler à vos interlocuteurs. L’ennui, c’est qu’ils ne sont pas tous dupes. Certains d’entre eux sont doués d’empathie ! Alors, si vous n’êtes pas doué pour le mensonge, autant fréquenter la vérité ou quelque chose d’approchant. Rappelez-vous ! Vraiment, sincèrement, franchement sont des adverbes qui détroussent la vérité au profit du mensonge.
C’est bien dit.
Trop de mots pour si peu de choses.
hum, … »Vraiment, sincèrement, franchement » sont des mots que j’utilise couramment vraiment, franchement et en toute sincérité; je savais déjà qu’ils étaient détournés à buts de mensonges mais cet article me perturbe, lol, maintenant, j’vais sursauter à chaque fois que je vais les dire!!
=)
Ne serait-ce pas une incitation à comprendre le poids de ces mots plutôt que de les cataloguer ?
Sincère ment, franche ment, vrai ment
cf. http://www.dailymotion.com/video/x1c3mm_enfin-pris-extrait_creation?ralg=behavior-meta2#from=playrelon-12